Écrit le 31 décembre 2016
1804-2017 : 213 ans d'indépendance, DE HÉROS À ZÉRO
Avec la fameuse et féconde révolution de 1804, les anciens captifs des côtes africaines mis en esclavage à Saint-Domingue par des blancs racistes, ont étonné l'humanité, prouvant que toute différence basée sur une question épidermique ne peut qu'être vile. Ils ont acquis à la sueur de leur front une liberté que leur avaient privé leurs oppresseurs depuis 3 siècles.
Malgré une indépendance si chèrement et fièrement acquise, il ne serait pas exagéré de penser qu'on n'était pas prêts à prendre en main notre destinée en tant que peuple. Le général en chef de l'armée indigène -devenu gouverneur général à vie- allait être assassiné en 1806 par ses lieutenants jaloux et assoiffés de pouvoir (déjà à cette époque) qui nous avaient offert un macabre spectacle le 1er janvier 1807 à l'entrée nord de Port-au-Prince pour fêter le 3ème anniversaire de l'indépendance.
La jeune nation est du coup scindée entre le camp du roi Henri Christophe dans le Nord et celui de Pétion qui dirigea la partie occidentale et méridionale du pays.
Après la mort de ces protagonistes, Boyer prend les rênes du pays, d'abord en alliant le Nord à l'Ouest et au Sud, ensuite en pacifiant la Grande d'Anse terrorisée par un certain Jean-Baptiste Pierrier (Goman), enfin en unifiant Haïti à la partie-Est de l'île en 1822.
Boyer est connu dans l'histoire nationale comme celui qui a eu la plus longue durée de règne sans avoir pour autant un bilan digne de ce quart de siècle.
Rappelons les deux actes les plus marquants de sa présidence : réalisation de l'unité de l'île (09 février 1822) qui laisse encore des grognes du côté dominicain prétextant que cette "occupation" a retardé leur développement ;
le paiement honteux d'une "dette" pour une liberté héroïquement acquise.
Soulignons toutefois que c'est au cours de l'«occupation haïtienne» de la république dominicaine que cette dernière allait se libérer du joug de l'esclavage, en 1844.
Des guerres civiles marquèrent tout le long du 19ème siècle jusqu'à l'intervention étatsunienne en 1915 qui durera jusqu'en 1934 mettant ainsi à nu une partie de notre production agricole, déshumanisant et tuant nos paysans...
Après une série de coups d'État manigancés par une armée laissée en héritage par les occupants étatsuniens, vont être tenues de frauduleuses élections (comme presque toujours en Haïti) propulsant au pouvoir, en 1957, un «négrofou» du nom de François Duvalier qui passera à Jean-Claude son fils de moins de 18 ans, le trône.
Une question s'impose : Comment se fait-il que l'intelligentsia haïtienne, des cadres de l'armée, de la fonction publique, l'opinion publique en général acceptent de se soumettre aux caprices d'un mineur ?
Ce n'était pas forcément une question de système.
En 1986, chuta la dictature sanguinaire des Duvalier après l'exaspération de la violence gratuite, du vol généralisé, de la corruption d'État.
Depuis lors, dit-on trop souvent, on fait une expérience démocratique. On est dans la transition démocratique.
Les expériences sont fâcheuses. On a l'exemple de Leslie F. Manigat, excessivement formé, bien mûri, préparé pour être un homme d'État qui a accepté d'abreuver le sang de la ruelle Vaillant pour arriver au pouvoir.
On peut prendre le cas du prêtre catholique progressiste Aristide, se rangeant du côté des défavorisés avec un discours populiste devenu chef d'État réactionnaire, «chimère».
On a également l'exemple d'un Préval avec ses 10 ans de présidence qui a comme bilan la privatisation des institutions de l'État, la culture du laisser-aller, du jem'enfoutisme, du sepafòtmwen.
De l'indépendance à nos jours un constat s'impose : le tâtonnement est évident du point de vue de choix de régime politique. Ainsi, on est passé de GOUVERNORAT à EMPIRE avec Dessalines, de MONARCHIE (dans le Nord) à RÉPUBLIQUE pour une nouvelle expérience de l'EMPIRE avec Soulouque pour enfin revenir à la RÉPUBLIQUE.
300 ans déjà on parlait de l'homme du livre (BookMan) de par son intelligence (selon des historiens) à Nèg bannann (BananaMan) légué par un dément Sweet Micky, le dernier des malfrats qui fut bel et président de la république, dont les maîtres-mots de sa gouvernance furent la corruption, l'amateurisme, le persiflage, la goguenardise, le copinage.
On est passé des meilleurs aux moins-que-rien comme parlementaires.
On est passé d'un État-perle à un État-poubelle.
On a inventé la liberté pour les Noirs, aujourd'hui on n'est plus libre avec un aigle perchant sur notre palmiste.
On est passé d'un État civilisateur à un État vagabond.
On est passé de terre d'accueil à terre de transit pour ses propres fils.
On est passé d'un État qui donnait à manger aux autres à un État qui ne peut nourrir sa population, à un État mendiant.
On est passé de HÉROS À ZÉRO.
Et çà ne dérange personne.
Ourdy DESSOURCES, in JOURNAL D'UN RÉVOLTÉ
31 décembre 2016
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