Le bruit !
À la Jamaïque, il fut un temps, où il était interdit de troubler le silence à partir de sept heures du soir même avec un simple transistor.
Dans l’île on n’aime pas trop penser à cette époque où le joug de Londres pesait sur les cœurs et sur les consciences.
Mais chez nous le bruit nous déshumanise.
On fait du bruit sans penser à l’autre. On fait du bruit comme pour prouver qu’on existe. Comme pour prouver qu’on est libre de faire de ce qu’on veut sans se soucier de l’autre.
Devant les écoles, devant les hôpitaux, on fait du bruit.
Dans les quartiers résidentiels, on fait du bruit.
Et celui qui fait ce bruit, qui le produit, n’a même pas conscience qu’il dérange l’autre.
Mais l’autre existe-t-il ? Voici une question à laquelle on devrait bien essayer de répondre.
L’autre est celui qu’on méprise parce qu’on s’arroge le droit de l’abrutir avec son bruit, comme avec ses immondices que de sa méprisante hauteur on déverse dans les eaux de pluie.
Le problème, c’est qu’on en vient à s’habituer au bruit. On dort même avec le bruit. Le bruit ne dérange plus. De toute manière, on a peur de demander à l’autre de baisser le volume de son haut-parleur. Ce serait un crime de lèse-Jésus que de demander à un pasteur d’enlever son mégaphone sur le toit de son temple, car il n’a pas le droit d’abreuver les autres qui ne l’ont pas demandé avec ses prêches. Cela devient alors une violation de l’espace privé, de la vie privée. Talibans en herbe !
On est tellement submergé par le bruit qu’on s’habitue même avec un autre bruit. Celui des discours qui ne veulent plus rien dire. De ces politiques qui viennent ânonner sur les ondes de certaines stations de radio pour ressasser les mêmes choses qui ne veulent plus rien dire. Du bruit ! De la cacophonie !
Comme ces pétarades de motocyclettes qui aux heures les plus avancées de la nuit vous enlèvent le sommeil. Que dire des génératrices qui rythment nos rêves ! Il y a aussi les chiens qui se mettent à tout moment à aboyer, parfois à l’unisson. Les chiens, ils sont partout. C’est l’un des rares pays où autant de chiens errants occupent le macadam. On se demande même pourquoi les gens veulent avoir un chien si c’est pour qu’il erre dans les rues. Certains prétendent qu’un chien chez soi, c’est comme un paratonnerre pour les mauvais airs… Bref, du bruit. Du bruit partout.
Il faut aussi du bruit, beaucoup de bruit quand il n’y a que du vide dans la tête. Notre pays se retrouve de plus en plus vide d’idées. Vide de vertu. Vide de cœur.
Alors il faut du bruit. Encore du bruit. Pour ne pas faire face à ce silence qui ouvre la porte de votre néant.
Légiférer sur le bruit ! Une vraie gouvernance ne pourra y échapper.
Gary VICTOR
20 avril 2016
Le bruit
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